Blogs maraîchers : l’écriture comme exutoire à un quotidien d’une densité insensée

Le blog, ça fait déjà des années que c’est ringard. Symbole du web 2.0, les premiers blogueurs ont parfois eu leur heure de gloire – souvenez-vous, on parlait alors de blogosphère. Depuis, il y a eu Facebook, Tweeter et Instagram. Faut être sacrément accroché pour ouvrir un blog aujourd’hui : n’importe quel réseau social offre des outils rédactionnels identiques et une audience supérieure. Une seule profession semble n’avoir rien compris à l’air du temps et continue à écrire des articles à l’ancienne : les maraîchers. Le genre de types qui n’ont pas de smartphone et qui n’ont pas de compte Facebook (ou alors juste pour mettre des liens vers leurs articles). Des dinosaures. Et c’est même pas pour y mettre des photos de leurs gros tracteurs ou de leur matos flambant neuf, non ! La plupart d’entre eux se prennent en photo les mains dans la terre, les vêtements sales, en train de désherber des poireaux et de s’extasier devant le moindre insecte qui leur passe sous le nez. Des extra-terrestres, on vous dit !

Il est écrit sur leur bandeau : «site d’informations agricoles et culinaires pour les abonnés à nos paniers et toutes les personnes soucieuses de comprendre ce qu’elles mangent».

Avant de m’installer aux Grivauds avec Fabrice, je suivais déjà plusieurs blogs. Certains ne sont plus alimentés, d’autres le sont toujours, comme le magnifique site du Biau Jardin de Grannod : de nombreuses pages de présentation et de longs articles racontant une récolte, un nouvel investissement ou donnant des conseils culinaires. Mais le must, c’est leurs fiches légumes, présentant à la fois le légume dans sa généralité, dans ses aspects culinaires et dans son itinéraire technique. Bon, c’est du maraîchage très technique mais assez éloigné de nos préoccupations de Sol Vivant, ce qui ne m’empêche pas de reconnaître le travail titanesque réalisé par le(s) rédacteur(s) du blog.

Une boutique, un blog et des galeries de photos dans un design très sobre : bienvenue à la Ferme du Hanneton !

Encore avant ça, en novembre 2015, j’ai passé quelques jours dans une ferme sarthoise : la Ferme du Hanneton. Le site, tenu par Delphine, sert de boutique en ligne. Mais il y a aussi une partie blog, d’une incroyable richesse ! En plus des recettes et des photos d’animaux (eux aussi ont un âne et des chats, alors on comprend), on trouve des articles extrêmement détaillés présentant leurs cultures (semis, itinéraires techniques, récoltes, conservation). Un exemple récent : la culture du mesclun. Tout y est, même les photos sont magnifiques. Pour nous qui sommes encore en train de bricoler nos plans de culture et de programmer nos semis, on est très très envieux de leur Calendrier «Semis-plantation-récolte». Je suis ce blog depuis mon passage là-bas et j’ai été très triste lorsque j’ai appris que Delphine avait décidé d’arrêter (pour raisons de santé). La ferme est reprise par Aline, leur salariée. Je sais que Delphine passe régulièrement lire nos articles alors j’en profite pour lui tirer mon chapeau et la remercier pour tout ce qu’elle a partagé à travers son blog.

Autour des Grivauds, il y a plusieurs collègues qui ont aussi leur site. Les Mangetouts de Saligny ont choisi Tumblr pour raconter leurs cultures en images : https://lesmangetoutsenimages.tumblr.com/. On y trouve une mosaïque d’articles très courts mais publiés avec une grande fréquence (un par jour !!!). Parmi les nouveaux venus, il y a aussi les Jardins de la Brouette Bleue (à Saint-Aubin sur Loire). Les articles sont plus rares mais plus développés. Aurélie nous y présente son jeune verger, ses essais de culture de légumes et ses incroyables confitures. Depuis quelques temps, il y a un certain Florian qui vient nous rendre visite sur notre blog ; lui-même est un maraîcher en cours d’installation (dans le Maine-et-Loire) et il a pris les devants en commençant à raconter son histoire en amont du lancement de son projet. Le site s’appelle De la Graine au Légume et on peut y lire un nouvel article tous les dimanches matin.

Bon, mais avec tout ça, je n’ai rien raconté de ce que nous avons fait à la ferme cette semaine… Disons que la galerie ci-dessous devrait y remédier.

Bonnes fêtes à tous !

Notre jardin a une épine dans le pied : son camion rouge !

Notre camion porte-légumes

Pas besoin de stickers sur notre camion : tout le monde nous reconnaît facilement, notamment grâce à sa couleur rouge – vu son état de propreté, je devrais plutôt dire «rougeâtre»… Passons. Avec ses 260 000 km et ses 18 ans d’âge, on peut dire qu’il aurait mérité une bonne retraite. Et comme il sent qu’on n’a pas tellement envie de l’envoyer se la couler douce à la casse du coin, il nous rappelle de temps à autre qu’il commence à fatiguer. La semaine dernière, vous vous souvenez qu’on était restés en rade à Vichy à cause de la courroie de l’alternateur. Mardi, on a fait l’aller-retour pour revenir chercher le bestiau avec une belle courroie toute neuve. Las, mardi soir, la batterie était morte ! Nouvel aller-retour en urgence chez un garagiste (à Coulanges, cette fois-ci) pour la remplacer. Dans la foulée, on fixe un rendez-vous la semaine prochaine pour faire le point sur notre camion porte-légumes : est-ce que, moyennant quelques menues réparations, on ne pourrait pas faire durer un peu la plaisanterie encore quelques années, histoire de nous laisser le temps de mettre un peu de sous de côté et d’éviter d’avoir à passer par la case «prêt bancaire» ?… On croise les doigts mais on ne se fait pas trop d’illusions. Dommage, on avait l’impression d’avoir pas trop mal négocié notre année, économiquement parlant.

Installation de l’aspersion en serre nº5

Côté jardin, on essaie de trouver le temps de faire avancer nos chantiers d’hiver : nettoyer les dernières planches de culture en serre, planter de la mâche à tour de bras, installer l’aspersion dans la serre nº5, peaufiner nos plans de culture et faire les commandes de toiles et de filets pour l’année prochaine. On garde en tête qu’après la mi-janvier (date à laquelle on se fait livrer les nouvelles serres), tout va s’accélérer et qu’on aura moins de temps pour toutes ces petites choses. Sur la liste des trucs à faire, on trouve la taille des haies, la réparation du toit en tôle de la bergerie et l’élargissement du chemin qui va des serres à la chambre froide (celui qui passe sous le figuier). Entre autres. Ajoutez à ça qu’on se prépare à deux gros marchés fin décembre et ça vous donne une idée du remplissage de nos journées. Bon, ne vous inquiétez pas trop, on se prépare aussi des vacances et quelques petites pauses ici et là.

Lumière d’hiver

Lumière matinale sur notre petite mare

Vous avez remarqué à quel point la lumière est particulièrement belle en hiver ? Je ne parle pas de l’ambiance laiteuse des journées couvertes, mais surtout des moments ensoleillés, où la lumière est continuellement rasante, créant ainsi de forts contrastes sur le moindre relief, sur la moindre plante, sur les visages, les corps et les paysages. La lumière du Soleil, attaquant notre hémisphère avec un angle prononcé, doit traverser plus d’atmosphère qu’en été pour nous atteindre. Il s’en suit que son effet thermique est amoindri et que son spectre semble enrichi en rouge, orange et jaune. Les journées les plus claires sont aussi les plus froides et de ce fait, on a connu quelques belles gelées cette semaine. Quatre jours de suite, on a démarré la journée avec des températures entre -5°C et -4°C. Comme on a pu le constater l’année dernière, là où la paille est jeune, la température descend de façon vertigineuse (-8°C dans la serre nº3). Le givre est omniprésent dans notre champ, achevant de donner une allure féerique à nos cultures. Et le dernier jour (vendredi), la surface de notre petite mare était entièrement gelée.

-8°C dans la serre nº3 ; la faute à la paille neuve !

On remplit nos matinées avec du travail administratif, qu’on réserve pour ce genre d’occasion (remplir les plans de culture, commander les graines, les toiles tissées et les filets anti-insectes pour la saison prochaine). On guette le dégel pour aller faire nos récoltes, car, en plus de l’Amap de mercredi, on a aussi le marché de Vichy de samedi à préparer. Choux, épinards, batavias, scaroles, blettes, panais, navets, persil, mesclun, poireaux : tout ça se récolte au fur et à mesure des besoins et il faut attendre que le légume ne soit plus gelé avant de le prélever.

Vicissitude du maraîchage : on perd parfois beaucoup de temps avec des histoires de mécanique. Samedi après-midi, de retour du marché, on se retrouve en panne à Cusset : la courroie de l’alternateur de notre camion a cédé. Rien de très grave en soi mais on perd beaucoup de temps à attendre une dépanneuse et on rentre chez nous en taxi en laissant notre camion à Vichy. Réparation prévue pour le début de la semaine prochaine : on devrait être en mesure de livrer nos légumes mercredi prochain. Par contre, on sent déjà qu’il va nous falloir changer de camion un de ces quatre et ça ne nous enchante guère…

À la semaine prochaine !

Grève du 5 décembre : et pourquoi pas nous ?

Si on fait grève jeudi, Florin nous promet de garder le jardin…

Je ne sais pas vous, mais nous, on se tâte un peu, pour la grève de jeudi prochain. Bon, il paraîtrait qu’on serait plutôt gagnants avec la réforme des retraites, mais si tous nos proches en pâtissent, quel intérêt ? Et puis, on ne peut pas se satisfaire d’un système de retraite par points, ni d’une réforme qui baissent les pensions ou qui augmente de fait l’âge de départ à la retraite. Dans un pays avec un tel taux de chômage, c’est aberrant de maintenir les gens en poste aussi longtemps. Je ne vous refais pas le couplet, mais c’est un peu tout le temps les mêmes qui paient. Alors, que … «de l’argent, il y en a, etc.». Bref, on a plein de bonnes raisons de soutenir ce mouvement. On y pense très fort en tout cas et il en faudrait peu pour qu’on nous retrouve jeudi dans un cortège avec un beau calicot «paysans en colère». Sauf que… Sauf qu’on va sur le marché de Vichy samedi et qu’on a besoin d’une journée et demie pour le préparer (surtout que les journées sont très courtes en ce moment). Or, ça nous sera très difficile d’anticiper les récoltes mercredi, à cause de la météo (on n’est pas sûrs d’avoir un dégel mercredi après-midi en partant de -8°C au lever du jour…). On verra bien. Quoi qu’il en soit, si vous en êtes, sachez qu’on vous soutient !

C’est fini : tous les pieds de tomate sont désinstallés ! (Merci Lili !)

D’ailleurs, concernant le froid qui s’annonce, même s’il est de courte durée, on prend la situation très au sérieux : on purge l’arrosage, on démonte les asperseurs et on cache toutes les cultures sous des voiles (P17). Pour les cultures les plus sensibles (épinards, blettes, fenouils), on place les voiles sur des arceaux pour éviter tout contact avec une matière gelée. Laurence, notre stagiaire de l’année dernière, de passage aux Grivauds, nous file un coup de main pour ces installations. Tiens, profitons-en pour vous donner de ses nouvelles ! Figurez-vous qu’après avoir terminé son Bprea, elle s’est fait embauchée chez un maraîcher près de chez elle. L’expérience a eu des bons et des mauvais côtés, si bien qu’elle avait envie de nous la raconter dans le détail. Comme elle est actuellement entre deux contrats, elle en a profité pour voir comment avait évolué le jardin en son absence. Car notre jardin appartient à ceux qui y contribuent et tous ceux qui y passent sont les bienvenus pour exercer un «droit de regard». Lundi et mardi, on a eu Lili avec nous, pour nous aider à désinstaller les dernières tomates et à désherber les épinards.

Séance d’observation dans la Réserve Naturelle Régionale du Val de Loire Bourbonnais, avec Sandrine et Fabrice

Dimanche dernier, on avait envie de se mettre un peu au vert (pour changer), et on a été se promener dans la Réserve Naturelle Régionale du Val de Loire Bourbonnais. Au programme, quelques belles observations de courlis, de bernaches et de grues. Les photos que j’y ai prises à la tombée de la nuit ne sont pas tellement montrables ; tant pis ! Par contre, aux Grivauds, on a enfin réussi à photographier le bouvreuil qui nous nargue depuis quelques semaines en nous tournant autour et en se cachant dans les feuillages !

À la semaine prochaine !