Pardon, pardon ! Je sais qu’on vous a saturés d’informations à ce sujet et que tous les médias ne parlent que de ça en boucle. N’empêche, nous aussi on a besoin de s’exprimer sur le sujet, par qu’il nous préoccupe peut-être bien plus qu’on ne le voudrait. Ne tournons pas autour du pot et lâchons les grands mots : la sécheresse est de retour ! Je vous vois faire la moue devant votre écran ; vous pensiez qu’on parlerait d’autre chose ? Allons, ça viendra, promis. Mais la sécheresse, c’est sérieux, très sérieux ! Depuis le 5 mars, il n’a pas plu aux Grivauds (quelques gouttelettes de temps en temps mais rien de significatif). Et les bulletins météos sont unanimes : personne ne sait prévoir la fin de cette sécheresse ! Aux Grivauds, on voit déjà des fentes de rétractation (les argiles secs se fissurent), un phénomène plutôt typique du mois de juillet… On a déjà plusieurs planches de culture installées en plein champ et leurs besoins en eau ne sont pas satisfaits (épinards, salades, oignons en mottes et carottes en tunnel nantais). Du coup, on installe déjà de l’arrosage un peu partout. Hasard de notre plan de culture, les cultures en question ne sont pas jointives et c’est un gros travail de toutes les irriguer. Avec l’arrivée de la douceur printanière, nos sols vivants sont censés passer par un pic d’activité et finir de dégrader la paille déposée l’année dernière, libérant ainsi de précieuses unités d’azote – c’est comme ça qu’on obtient l’auto-fertilité. Or, la déshydratation superficielle risque de limiter le travail des vers de terre, des limaces, des champignons, etc. Si la pluie ne revient pas rapidement, on devra compenser cette perte de fertilité en épandant du compost ; un comble ! Ce qui nous préoccupe surtout dans cet épisode météorologique, c’est qu’il nous rappelle de mauvais souvenirs… Des souvenirs pas si anciens que ça… Une façon de nous rappeler que ça n’est pas parce qu’on ne parle plus du réchauffement climatique qu’il ne poursuit pas sa funeste besogne. C’est dit !
Histoire de compliquer un peu le tableau, la clarté du ciel et le vent d’est nous ont apporté des gelées systématiques pendant deux longues semaines. Tous les soirs, on cache les cultures qui craignent le gel (dont les courgettes) ainsi que les plants de légumes d’été (tomates, aubergines, haricots, poivrons, etc.). Et tous les matins, on décache les cultures qui ont besoin de «respirer» et de prendre beaucoup de lumière. Malgré notre discipline d’enfer, nos courgettes sont mal en point. Pas à cause de la gelée, non ! Mais plus vraisemblablement à cause d’un champignon du collet ou des racines (diagnostique difficile à établir) qui a profité du stress de nos plantes pour leur sauter dessus. Maintenant que les gelées sont terminées, on espère que le réchauffement du sol permette aux courgettes de décoller. Pour information, en début de semaine, la température du sol était descendue à 10°C au pied des courgettes, pourtant plantées sous une bâche noire ! Autre phénomène inattendu, nos petits pois se sont courbés ! Comme ils n’ont pas connu de gelées pendant l’hiver, ils ont poussé très vite et leurs tiges n’étaient pas endurcies. Pas de casse, a priori, mais il va falloir tout redresser et tirer un fil pour ramener les rangs sur le filet à ramer.
On râle, on râle, mais apprendre à faire face à une météo agressive, on sait bien que ça va devenir le défi nº1 de notre profession dans les années à venir. Finalement, on s’en accommode pas si mal que ça aux Grivauds et on arrive déjà à produire pas mal de légumes malgré ça. Bon. Par contre, la crise du Covid-19, ça, on ne pouvait pas prévoir ! Ah, je vous avais bien dit que j’y viendrais ! Alors ? Quel impact après 3 semaines de confinement ? La principale conséquence pour nous, c’est qu’on se retrouve sans stagiaire et sans wwoofeur pour une durée inconnue. Nous sommes en pleine période d’installation des légumes d’été et nous savons déjà que nous ne serons pas capables de tout planter dans les temps. Chez nous, c’est toujours la mise en place d’une nouvelle culture qui prend le plus de temps : on nettoie la planche de ses vivaces (potentilles, renoncules, pissenlits, etc.), on paille et on plante à travers la paille. Ça nous demande bien plus de temps que si nous étions en sol travaillé ! Certes, on gagne du temps en pleine saison, parce qu’on désherbe finalement très peu. Pour vous donner un ordre de grandeur, cette semaine, on a implanté 30 m d’échalotes (paillées dans la foulée), 44 m de pommes de terre (paillées aussi), 12 m de persil et 23 m de courgettes (sur toile de chanvre). À quoi on ajoute 25 m de paille prête pour recevoir des salades en plein champ. On est le 5 avril et on n’a toujours pas planté une tomate… Finalement, on est revenus à la situation de 2018, où on avait passé une bonne partie du printemps tous seuls. Sauf, que cette année-là, nos premiers paniers d’Amap ont été durs à remplir et qu’on n’a pas pu aller sur le marché de Vichy avant fin juin – et encore, seulement toutes les deux semaines. Perspective peu réjouissante, surtout qu’on sait que les maraîchers font une grosse partie de leur chiffre d’affaire avec du légume d’été…
En dehors de ça, on s’en tire plutôt bien ! On n’est pas malades, on a nos proches auprès de nous, on peut produire et on peut vendre. Sandrine et Mathilde viennent filer un coup de main de temps en temps et ça nous fait du bien ! Pour le moment, on vend sans problème nos légumes à Pierrefitte et on est bien contents de cette situation. On se doute qu’après le confinement – en été notamment – on risque d’avoir du mal à écouler nos légumes sur un si petit marché. D’autant plus que les gens ont des jardins ici et que beaucoup de monde fait ses tomates. Tant pis ! L’expérience aura été intéressante ; et même plaisante, disons-le !
À la semaine prochaine !
Oui, bon. Bah, c’est une question de perspective, hein.
Dans l’agro-écologie, on voit les conséquences à long terme de la crise écologique, maintenant bien installée, pour l’humain et le non-humain.
Et les grands groupes industriels, qui possèdent entre autre la majorité des média, s’inquiètent du fait que leurs actionnaires ne pourront peut-être pas partir en vacances à l’autre bout du monde, cette année !
Faut pas s’en faire. Tout va bien pour le capitalisme ! ❤💕❤💕❤💕
Les paysans ça changera jamais, toujours en train de se plaindre. Ils voudraient que la nature fasse le boulot à leur place. Et au lieu de bosser, voilà-t-y pas que Denis nous gratte des pages entières de ses malheurs et que Sandrine nous en rajoute une couche avec le capitalisme !