La semaine dernière, on s’est quittés un peu sèchement je crois. C’est que nous avions besoin d’exprimer notre dépit d’avoir en si peu de temps perdu autant de légumes… Une semaine s’est écoulée, on a fait le deuil de nos salades et on a regardé nos plantes réagir à l’agression des grêlons. On a vu les feuilles de betterave se relever malgré leurs trous, les courgettes ré-émettre des fleurs, les Blue Ballets cicatriser vaillamment. Incroyable résilience végétale. Mais surtout, quelque chose a changé aux Grivauds. Quelque chose que nous attendions depuis de longues semaines : ça tombe enfin dans les tomates.
«Ça tombe», en langage maraîcher, ça veut dire que les récoltes deviennent soutenues et régulières. Ça y est nous pouvons désormais mettre des tomates dans les paniers d’Amap. Et nous avons de quoi remplir nos grandes panières rondes avec des tomates anciennes sur le marché de Vichy. Vous le savez, la météo met nos cultures à rude épreuve cette année et nos pieds de tomates ont été soumis à des stress assez extrêmes : gelées tardives, sols froids, air humide, faible ensoleillement. Du coup, les attaques fongiques sont légions et font des dégâts parfois spectaculaires : mildiou dans les tomates cerise (notamment les Black Cherry), alternaria dans les Saint-Pierre, Botrytis (notamment dans les Green Zebra et les Purple Calabash) et, probablement, Corky Root (on a des pieds aux couleurs violacées qui nous laissent songeurs). Bref, on devrait être inquiets. Mais non ! Au contraire, on est plutôt contents de nous. Pourquoi ? Parce que la grande majorité de nos pieds se défend vraiment très très bien ! Le point commun entre ces pieds en bonne santé ? Ils sont tous greffés.
Vous vous souvenez, on a pris la décision de greffer nos tomates cette année, pour lutter contre un parasite racinaire qui s’accumule au cours des années : le Corky Root (racine liégeuse). Ce parasite est commun dans les jardins où les tomates sont toujours plantées au même endroit. Il se peut même que notre pratique du MSV (et notamment le non-travail du sol) favorise l’accumulation du pathogène. Les symptômes sont très clairs : mi-juillet, les plants s’affaiblissent, la croissance se ralentit, les tiges s’affinent et les fleurs coulent. En conséquence de quoi, on se retrouve à court de tomates en septembre.
La greffe a été une opération délicate et Fabrice se souvient encore des sueurs que ça lui a causées. Devant les taux d’échec et la peur de mettre tous nos œufs dans le même panier, nous avons choisi de ne pas greffer 100 % de nos plants. Et c’est comme ça qu’on se retrouve avec des pieds greffés et non-greffés dans les mêmes serres. Les dernières gelées ont fait mourir quelques pieds ici et là et nous les avons remplacés au fur et à mesure. Il y a deux cas très intéressants : dans les Green Zebra non-greffées, nous avons planté un pied de Green Zebra greffé. Et dans les Roses de Berne greffées, nous avons planté un pied de Roses non-greffé. Ces deux cas d’école sont présentés dans les photos ci-contre. Et plaident pour une conclusion sans appel : nous DEVONS désormais greffer nos tomates. La question qui reste en suspens est celle du goût. J’aurais aimé pouvoir comparer sérieusement mais l’année ne s’y prête pas. Nos tomates ont mûri sans soleil et n’expriment pas leur plein potentiel gustatif. Ce qui ne nous empêche pas de nous régaler de la douceur des Earl of Edgecomb et de la suavité des Roses de Berne.
En espérant que vous partagerez ce petit enthousiasme gustatif, je vous souhaite une belle semaine.
Ça, c’est vraiment un bon article !
Même si ça manque QUAND MÊME d’une photo de chat mi-roux mi-blanc…
Le premier chapitre de mon été s’est écrit aux Grivauds, quoi de mieux pour commencer une aventure ? <3