Inflation et légumes

Faudra-t-il encore augmenter les légumes sur le marché ? Et à l’Amap ?

Oh non ! Pas eux ! Pas les légumes ! On aimerait tellement que l’inflation actuelle les épargne, qu’ils restent cette denrée populaire qu’on peut se mettre sous la dent sans craindre de jamais se ruiner[1]Sauf si vos légumes préférés sont les asperges, les haricots verts et la salade en mesclun…. L’année 2022 ne fait que commencer mais il y a gros à parier que les prix des légumes devront augmenter assez fortement. Pourquoi ? Tout simplement parce que les charges de fonctionnement des maraîcher·ères vont augmenter. En cause, deux facteurs distincts. D’abord, la hausse du prix du pétrole, dont on vous a déjà parlé précédemment. Et ensuite le fait qu’on sorte d’une mauvaise année agricole, ce qui augmente le prix des graines, des plants de pomme de terre, des bulbilles d’oignons, etc. Pour vous donner une idée, on s’est amusés à relever quelques prix tirés de nos factures de cette année et de l’année dernière. Pour chaque référence, on a été piocher chez les mêmes fournisseurs, histoire de comparer ce qui est comparable.

Quoi ?FournisseurPrix début 2021Prix début 2022Taux d’augmentation
Gasoil (1 litre)Bi11,38 €1,73 €+ 25 %
Plateau de mottesSabio d’Argile3,00 €3,00 €
1000 plants de poireaux TadornaEarl Fleury50,60 €52,60 €+ 4 %
25 kg de bulbilles d’oignons SturonMonJardin81,30 €89,00 €+ 9,5 %
25 kg de plants de pomme de terre Agata (cal. 28/35)MonJardin43,80 €45,00 €+ 2,7 %
250 Graines enrobée de Laitue AnalottaAgroSemens16,20 €16,70 €+ 3,1 %
Toiles tissées 130g/m2 1,65m x 100mChipier85,80 €114,10 €+ 33 %
Gants Maxidry T9Triangle Outillage10,20 €8,50 €– 17 %

Ce tableau ne prétend pas être très rigoureux : nous avons choisi quelques produits, sans méthode particulière. Néanmoins, on a la nette sensation que la hausse des charges de fonctionnement qui pèse sur les activités agricoles est bien supérieure à l’inflation (1,6 % en 2021). Et c’est particulièrement vrai pour ce qui est directement issu des industries pétrochimiques (gasoil +25% et toiles tissées en plastique +33% !). Cette hausse s’ajoute à celle des cotisations MSA. Cette année, la cotisation intègre les résultats 2020, qui ont été plutôt bons pour tout le monde. Sauf que … l’année 2021 a été nettement plus difficile et les trésoreries, à la sortie de l’hiver, ne sont pas toujours prêtes à affronter toutes ces augmentations. Donc, oui, malheureusement, il y a gros à parier que les maraîcher·ères répercuteront ces augmentations sur les prix des légumes… Est-ce déjà perceptible ? Je vous propose un deuxième tableau, présentant les prix moyens au kilo de certains légumes bio en décembre 2019, 2020 et 2021, pour la région Auvergne-Rhône-Alpes. Les données sont issues des sondages effectués par la Frab AuRA auprès des producteur·ices bio.

LégumesPrix décembre 2019 (en €)Prix décembre 2020 (en €)Variation 2019/2020Prix décembre 2021 (en €)Variation 2020/2021
Carotte2,762,75-0,4%2,85+3,6%
Betterave2,802,82+0,7%2,89+2,4%
Blette3,063,12+2,0%3,23+2,9%
Chou lisse2,682,78+3,7%2,79+0,4%
Courge Butternut2,732,72-0,4%2,77+1,8%
Pomme de terre chair ferme2,332,26-3,0%2,33+3,1%
Oignon jaune3,083,07-0,3%3,14+2,3%
Salade au poids4,404,32-1,8%4,57+5,8%
Poireau3,373,42+1,5%3,40-0,6%

Ces variations sont à comparer avec l’inflation moyenne de 2020 (+0,5%) et celle de 2021 (+1,6%). On le voit, 2020 a été une bonne année pour les producteur·ices et certains prix ont pu baisser. Par contre, en 2021, à part l’inexplicable baisse des poireaux, quasiment toutes les variations de prix sont au dessus de l’inflation. Mais elles restent modérées pour le moment. La hausse des charges n’a pas encore été complètement répercutée. Le sera-t-elle ? Les producteur·ices attendront-ils de savoir si leur année est bonne avant de modifier leurs prix ? Sur le marché de Vichy, nous, on a commencé à augmenter légèrement certaines références, ne le cachons pas. Tant que nos finances ne nous permettent pas de tirer des salaires régulièrement, on se considéra légitimes à le faire. Mais ça n’empêche pas qu’on n’a pas envie de nous couper d’une clientèle populaire et d’être considérés comme des «maraîchers luxueux»… Aussi, pour continuer à maîtriser nos prix, nous aussi, nous tablons sur une meilleure réussite de nos cultures cette année. Néanmoins, il reste une incertitude sur nos débouchés estivaux. L’année dernière, nos ventes s’étaient brutalement contractées en été et en automne, une tendance constatée à l’échelle nationale pour l’ensemble du secteur de la Bio[2]https://www.novethic.fr/actualite/environnement/agriculture/isr-rse/l-essoufflement-du-bio-ne-signe-pas-la-fin-du-marche-mais-sa-necessaire-remise-en-question-150592.html. Un contexte difficile donc pour établir une stratégie à long terme.

À suivre…

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