Umami

Tomates cerise «Green Grape», des fruits au goût surprenant

Les tomates sont là, nombreuses, généreuses, colorées, appétissantes. Les esprits chagrins mentionneront que les taux de sucre sont bas cette année, notamment parce que les tomates mûrissent presque sans soleil. N’empêche, elles sont excellentes ! Et, non, cette fois-ci, je ne vais pas vous ressortir le couplet sur l’effet terroir en MSV. Même si ça me démange. Non, aujourd’hui, j’ai envie de partager avec vous une découverte. Tout part d’un constat : les petites mains des Grivauds plébiscitent régulièrement nos tomates cerise. Et notamment nos tomates jaunes (variété Green Grape). J’entends un peu de tout à propos de ces tomates, et notamment qu’elles sont très sucrées, ce avec quoi je suis partiellement d’accord. Adeline, de retour aux Grivauds pour 3 semaines de stage, m’explique son ressenti : «on a l’impression de recevoir un câlin quand on mange cette tomate». Bon. Il y a visiblement une saveur dans cette tomate qu’on ne retrouve pas ailleurs. Mais comment la décrire ? J’essaie de me souvenir du vocabulaire utilisé par les amateurs de vin ou de thé. Souvent, pour décrire une saveur, on la compare à d’autres références. Par exemples d’autres fruits. Mais là, je suis un peu à la peine. Alors, je convoque mes saveurs primaires : sucré, salé, acide, amer et umami. Sucré, certainement. Amer, non. Acide, un peu. Salé ? Tiens, je ressens bien une nuance minérale. Mais je ne dirais pas que c’est salé, non. Umami ? Ça, jusqu’à il y a peu, je connaissais mal. Heureusement, sur France Inter, cet été, il y a eu une série d’émissions, qui, sous le titre de «Saveurs savantes», explorait le goût sous toutes ses formes. Et dans l’épisode traitant de l’umami, j’ai eu la confirmation que les tomates déclenchent bien la sensation d’umami dans la bouche. De quoi s’agit-il ? Y a-t-il un rapport avec le plaisir qu’on prend à déguster une Green Grape ? Explorons cette piste ensemble.

Les Earl of Edgecomb, des tomates de fin de saison, charnues et délicieuses

La saveur umami, on la connaît mal en Europe. La faute à notre éducation au goût, tout simplement. Parce que d’un point de vue morphologique, nos papilles sont les mêmes que celles d’un japonais alors il n’y a pas de raison qu’on y reste indifférents. Pour faire simple, il existe sur notre langue des cellules spécialisées dans la détection de trois molécules : le glutamate (ainsi que sa forme acide, l’acide glutamique), la guanosine monophosphate (GMP) et l’inosine monophosphate (IMP). C’est cette détection qui provoque la sensation umami, sensation agréable et persistante. La saveur umami crée, qui plus est, un certain «confort de bouche», notamment en stimulant la salivation. Les tomates mûres, et notamment les tomates cerise, contiennent de l’acide glutamique et procurent donc bien une sensation umami. Je parierais gros que les Green Grape en contiennent une dose supérieure à la moyenne ! Et parmi nos autres tomates, celles qui me paraissent le plus umami sont de nouveau celles de couleur orange (de variété Earl of Edgecomb). D’autres légumes ont un goût umami mais ils sont rares : les asperges, les brocolis, les épinards, les champignons…

Umami ou non, nos tomates ont été récoltées avec compétence par nos petites mains du moment : Cécile (qui nous a quitté en début de semaine), Suzanne (qui est wwoofeuse pour une semaine et qui n’est pas vraiment débutante…), Adeline (qu’on ne présente plus) et Étienne, son compagnon (qui a un statut de wwoofeur mais qui, en plus, nous concocte des petits plats mémorables). Alors, oui, il y a un peu de télescopage, mais c’est un peu fortuit. Du coup, tout avance d’un coup très vite. On récolte, on plante (des navets, des radis et de la mâche), on désherbe, on palisse et on prépare des colis de tomates. Bref, c’est pas parce qu’on est nombreux qu’on joue aux dés ou qu’on sirote des Piña coloda, non mais !

Bon, alors, qui reprend de la tomate, du coup ?

À la semaine prochaine !

Des melons et de la rhubarbe

Du melon à Vichy en plein mois d’août !

Aux Grivauds, on assume d’avoir des melons un peu tard en saison. Pour deux raisons. D’abord, parce que les melons qui mûrissent en août ont un incroyable goût de miel. Ensuite parce que ce sont des melons qu’on peut installer après une culture de printemps (par exemple après des carottes ou des navets nouveaux). Ils sont plantés fin-mai, début-juin, à une période où on n’implante plus aucun légume d’été. Sauf… des melons. Cette semaine, on est venus avec nos premiers melons de l’année sur le marché de Vichy et on est repartis avec nos caisses vides. Tout va bien : même si ces légumes arrivent à un moment inattendus, ils sont tout de même les bienvenus.

Une rhubarbe qui ne donne pas quand on l’attend…

Cette semaine, on a aussi récolté de la rhubarbe. La même rhubarbe qui a péniblement donné une première série de tiges au printemps… Cette fois-ci, on en récolte presque une dizaine de kilos et on est fiers de les présenter à nos clients. Résultat : on n’en a pas vendu du tout. Pour le coup, la rhubarbe qui ne pousse pas au printemps a peu de chance d’être vendue. Et on vient donc de le découvrir à nos dépends…

Mais finalement, ce qu’on retiendra de la semaine, ce sont surtout les 200 kilos de tomates récoltées mardi et vendredi… Ça au moins, c’est cohérent avec la saison…

À la semaine prochaine !

Les navets, c’est parti !

Plantation de navets avec Elsa et Guillaume. Ils me montrent qu’on peut même creuser deux pré-trous en même temps, avec un plantoir dans chaque main. On n’arrête pas le progrès !

C’est en août qu’on met la dernière touche à notre plein champ. Les dernières plantations, les derniers désherbages, les derniers semis. Passé le 15 août, normalement, on se concentre plutôt sur la remise en état des serres d’intersaison pour l’automne. Par contre, ça n’est pas parce que ce sont les derniers gestes maraîchers dans le champ qu’il faut les négliger. Et on ne hausse surtout pas les épaules en se disant «bon, les navets, ils attendront». Parce que les navets, eh bien, c’est bon, et, euh, ben, c’est facile à faire, alors, hein, faudrait pas s’en priver, hein. Et en plus, ben, c’est bon. En tout cas, moi, j’aime ça, alors voilà. Surtout braisés. Passons.

Cécile et Elsa installent de l’irrigation au dessus des plantations de navets. Eh oui, il fait enfin beau !

Cette semaine, malgré d’intenses récoltes de tomates, on a donc planté et semé des navets (et des radis d’hiver). Mais le plus remarquable, ça a surtout été la célérité de l’exécution de ces chantiers. À ce sujet, hommage soit rendu à nos petites mains de la semaine : Cécile, Elsa et Guillaume. Cécile, si vous ne la connaissez pas, c’est que vous ne lisez pas assez souvent nos articles. Et ça, c’est mal. Elsa et Guillaume, ce sont deux wwoofeurs pas vraiment débutants. Ils ont fait l’acquisition d’un terrain en Saône et Loire où ils ont le projet de faire pousser des légumes. De futurs collègues en somme. Alors, nous, on se met en mode «maîtres de stage» et eux nous font l’honneur de nous accompagner dans nos tâches toute la journée longue. Moralité, au bout de deux semaines, ils sont autonomes sur de nombreuses tâches, s’occupent presque entièrement de toute la re-fertilisation des plants de tomates et plantent des navets à la chaîne sous une chaleur terrifiante. Une dernière fois, nous aimerions les remercier du fond du cœur pour leur incroyable investissement au sein des Grivauds. Cette année encore, nous avons conscience de la chance que nous avons avec nos stagiaires et nos wwoofeurs. Sans ces «petites mains», nous serions obligés de travailler bien plus, de nous mécaniser plus, de renoncer à certains désherbages. D’évidence, on leur doit une bonne maîtrise de notre planning de travaux agricoles et une grosse réduction de notre stress quotidien. Bon, d’accord, on ne tire pas encore de salaires de notre activité, mais, au moins, on se marre tous les jours dans nos champs. Alors, hein, voilà.

À la semaine prochaine !

Tomates : reconnaître et intervenir… ou pas !

On a encore envie que vous nous plaigniez un peu… Figurez-vous que notre camion bleu, celui qu’on vient d’acheter à crédit, vient de passer une semaine au garage pour une histoire de relai dans une boite liée au démarrage… Et que dans le même temps, la vessie de notre pompe a éclaté, nous laissant sans arrosage pendant plusieurs jours de suite. La série noire continue. Vous me direz, l’arrosage, en ce moment, hein, on peut s’en passer, même sous serre, vu comme le temps est sombre et les températures peu poussantes. Bon, d’accord. Mais d’ailleurs, puisque vous me parlez de météo, apprenez que, pour couronner le tout, l’humidité et le manque de lumière sont en train de nous jouer un mauvais tour.

Liège sur les racines de tomate (Corky-Root)

Oui, je sais, ça fait deux articles de suite sur les tomates. Mais dîtes-vous bien que la tomate, pour des maraîchers, c’est un peu le nerf de la guerre, le beurre dans les épinards, le Graal sur la Table Ronde. Et comme elles sont arrivées très tard cette année, on les surveille comme le lait sur le feu. L’année dernière, passé le 15 septembre, la saison des tomates était pliée pour nous à cause du Corky-Root (maladie de la racine liégeuse). Alors, pour 2021, compte-tenu des moyens mis en œuvre, on aimerait bien tenir jusqu’à mi-octobre. C’est pour ça que lorsqu’on a vu le mildiou faire son entrée dans nos serres, on a froncé les sourires, on s’est exclamés «ah non, pas ça!» et on a sorti les sécateurs.

Des tâches brunes non compartimentées : mildiou !

Depuis que je suis arrivé aux Grivauds, le soin des tomates a toujours consisté à se concentrer sur la prophylaxie. On fait le maximum pour que les plantes poussent dans un environnement sain et fertile. Et ensuite, on les invite à se débrouiller un peu toutes seules. Pas d’effeuillage, pas de pulvérisation d’anti-fongique. La bonne réponse immunitaire des plants de tomates est en partie due à notre pratique du MSV : nos sols fournissent tout ce qu’il faut à la plante pour qu’elle puisse se défendre. On veille à ce que nos sols restent hydratés pour que la prospection racinaire se fasse bien, ce qui signifie que, en temps normal, on pratique l’aspersion. Mais seulement le matin, par une belle journée ensoleillée, pour que les feuillages soient secs le soir. Et pour lutter contre le Corky-Root, on a greffé une grosse partie de nos plants, comme on vous l’expliquait la semaine dernière. Bref, tout est fait pour qu’on n’ait pas besoin d’intervenir lorsqu’une tâche un peu suspecte apparaît sur nos feuillages. Mais, cette année, rien ne se passe comme prévu. Le temps est sombre et l’air est constamment humide. Du coup… les champignons foliaires se développent joyeusement. Un peu trop joyeusement pour qu’on ait envie d’en sourire…

Nouveauté de l’année : des chloroses provoquées par un virus… On remercie nos amis les pucerons de nous apporter des plaisirs variés…

Devant la variété des bizarreries constatées sur nos pieds de tomate, on a dû passer un peu de temps sur E-Phytia. Ce qui nous a permis de distinguer 4 problèmes différents (en se limitant aux parties foliaires) : le mildiou (oomycète dont les tâches ne sont pas compartimentées), l’alternariose (oomycète, dont les tâches sont entourées d’une chlorose), le botrytis (ascomycète générant une pourriture grise) et les viroses (créant des chloroses d’aspect variable, les virus étant véhiculés par les pucerons). Pour les trois premiers problèmes, une même règle prévaut : éviter que les feuilles ne restent trop humides. On se décide à effeuiller le bas des plantes pour faire circuler plus d’air au ras du sol. On désherbe, pour éviter que les adventices ne viennent mouiller les feuilles de tomates, par évapo-transpiration ou par guttation. Du mildiou, on en a rarement, et, en général, la plante finit par éliminer toute seule les feuilles contaminées. Sauf que, samedi matin, lorsque je me suis retrouvé face à la dernière série de Previa, dans la serre 1, j’ai pris peur : en 24h, le nombre de feuilles attaquées a doublé. C’est la rançon du succès : les pieds greffés ont des feuilles si grandes que l’air y circule mal. On se dit que, l’année prochaine, ça ne serait pas une mauvaise idée de conduire ces pieds en rang unique mais sur deux brins (en Y). Mais en attendant que faire ? Eh bien, on coupe. On tranche dans le vif, on élimine les feuilles contaminées et on les sort de la serre.

Je laisse mon regard se promener sur la flore spontanée des Grivauds et je fais les constats suivants. D’abord que, cette année, nos prairies et nos bords de chemin sont restés très verts. Ensuite que nombre de plantes sont aussi atteintes d’une grande variété d’agressions fongiques (mildiou et alternariose) ou parasitaires (acariens, pucerons, chenilles et autres larves mineuses). Je vous mets quelques exemple dans la galerie.

Et je vous souhaite une belle semaine !

Tomates greffées vs tomates non greffées

Ça tombe dans les tomates !

La semaine dernière, on s’est quittés un peu sèchement je crois. C’est que nous avions besoin d’exprimer notre dépit d’avoir en si peu de temps perdu autant de légumes… Une semaine s’est écoulée, on a fait le deuil de nos salades et on a regardé nos plantes réagir à l’agression des grêlons. On a vu les feuilles de betterave se relever malgré leurs trous, les courgettes ré-émettre des fleurs, les Blue Ballets cicatriser vaillamment. Incroyable résilience végétale. Mais surtout, quelque chose a changé aux Grivauds. Quelque chose que nous attendions depuis de longues semaines : ça tombe enfin dans les tomates.

De belles panières de tomates anciennes à Vichy, ça redonne le sourire !

«Ça tombe», en langage maraîcher, ça veut dire que les récoltes deviennent soutenues et régulières. Ça y est nous pouvons désormais mettre des tomates dans les paniers d’Amap. Et nous avons de quoi remplir nos grandes panières rondes avec des tomates anciennes sur le marché de Vichy. Vous le savez, la météo met nos cultures à rude épreuve cette année et nos pieds de tomates ont été soumis à des stress assez extrêmes : gelées tardives, sols froids, air humide, faible ensoleillement. Du coup, les attaques fongiques sont légions et font des dégâts parfois spectaculaires : mildiou dans les tomates cerise (notamment les Black Cherry), alternaria dans les Saint-Pierre, Botrytis (notamment dans les Green Zebra et les Purple Calabash) et, probablement, Corky Root (on a des pieds aux couleurs violacées qui nous laissent songeurs). Bref, on devrait être inquiets. Mais non ! Au contraire, on est plutôt contents de nous. Pourquoi ? Parce que la grande majorité de nos pieds se défend vraiment très très bien ! Le point commun entre ces pieds en bonne santé ? Ils sont tous greffés.

Vous vous souvenez, on a pris la décision de greffer nos tomates cette année, pour lutter contre un parasite racinaire qui s’accumule au cours des années : le Corky Root (racine liégeuse). Ce parasite est commun dans les jardins où les tomates sont toujours plantées au même endroit. Il se peut même que notre pratique du MSV (et notamment le non-travail du sol) favorise l’accumulation du pathogène. Les symptômes sont très clairs : mi-juillet, les plants s’affaiblissent, la croissance se ralentit, les tiges s’affinent et les fleurs coulent. En conséquence de quoi, on se retrouve à court de tomates en septembre.

La greffe a été une opération délicate et Fabrice se souvient encore des sueurs que ça lui a causées. Devant les taux d’échec et la peur de mettre tous nos œufs dans le même panier, nous avons choisi de ne pas greffer 100 % de nos plants. Et c’est comme ça qu’on se retrouve avec des pieds greffés et non-greffés dans les mêmes serres. Les dernières gelées ont fait mourir quelques pieds ici et là et nous les avons remplacés au fur et à mesure. Il y a deux cas très intéressants : dans les Green Zebra non-greffées, nous avons planté un pied de Green Zebra greffé. Et dans les Roses de Berne greffées, nous avons planté un pied de Roses non-greffé. Ces deux cas d’école sont présentés dans les photos ci-contre. Et plaident pour une conclusion sans appel : nous DEVONS désormais greffer nos tomates. La question qui reste en suspens est celle du goût. J’aurais aimé pouvoir comparer sérieusement mais l’année ne s’y prête pas. Nos tomates ont mûri sans soleil et n’expriment pas leur plein potentiel gustatif. Ce qui ne nous empêche pas de nous régaler de la douceur des Earl of Edgecomb et de la suavité des Roses de Berne.

En espérant que vous partagerez ce petit enthousiasme gustatif, je vous souhaite une belle semaine.