Mouron des oiseaux

Le Mouron des oiseaux, c’est mignon mais qu’est-ce que ça transpire !

On va vous avouer quelque chose. Attention, vous allez être surpris·es. En fait, eh bien, on aime beaucoup les plantes. Voilà. Toutes les plantes, même. Et des plantes, on en trouve même en hiver dans les jardins. Sauf dans ceux qui sont méticuleusement retournés et qui passent tout l’hiver le sol à nu. Mais ça n’est pas le cas aux Grivauds. Bref. En hiver, il y a une plante très présente dans nos serres, c’est le célèbre Mouron des oiseaux – aussi appelé Mouron blanc ou Stellaire médiaire. Cette plante est considérée comme une mauvaise herbe par les jardiniers : elle vient s’installer au pied des épinards et elle leur joue tout un tas de tours pendables. Cette plante transpire énormément et crée un climat très humide au ras du sol, propice à l’installation de maladies dans les cultures. Elle a un caractère concurrençant (pour l’eau et pour l’azote) et elle est même allélopathique : elle empoisonne légèrement le sol autour d’elle avec des substances phénoliques qui ont des effets négatifs sur les graminées. La coquine. Facile à désherber au stade plantule, elle développe rapidement un système racinaire fasciculé qui l’attache solidement au sol malgré une tige principale ridiculement fine. Impossible de l’arracher sans emmener une grosse portion de sol. Et quand elle est très développée, ses nombreuses tiges s’emmêlent sur le sol et n’autorisent plus le passage de la houe, qui se retrouve vite empêtrée de mouron.

La petite fleur du Mouron blanc

Mais nous, le Mouron, on l’aime bien. Avec ses délicates petites fleurs blanches en forme d’étoile, typiques des stellaires, on la trouve craquante ! D’ailleurs elle est parfaitement comestible : c’est même une excellente salade d’hiver, douce et sans aucune amertume. Et puis, elle nous apporte une information importante sur nos sols : comme c’est une plante nitrophile, sa bonne santé nous indique si notre sol est bien fertile. Jaune et chétive, elle nous avertit que nos salades d’hiver risquent de rester petites si on ne fertilise pas rapidement notre sol. Comme son zéro végétatif se situe à 2°C, elle est capable de pousser tout l’hiver et fleurit dès janvier, si on ne la désherbe pas avant. C’est donc une des floraisons les plus précoces de l’année. On essaie de limiter son installation en veillant à ce que nos sols restent bien paillés en automne. Mais, visiblement, ses graines peuvent germer même avec très peu de lumière et même si elles ne touchent pas le sol. On se retrouve donc condamnés à désherber toutes nos cultures (y compris celles sur bâche !) au moins une fois entre novembre et janvier si on ne veut pas risquer d’être envahis. Petit travail d’hiver pas bien méchant à condition de s’y prendre à temps.

À côté de ça, il y a les GROS chantiers d’hiver, ceux qu’on repousse toute l’année en ce disant que ça fera de quoi occuper nos calmes semaines de fin décembre. Par exemple, il y a le rangement et le nettoyage de tous nos espaces de travail, champ y compris. Le processus est simple : on choisit un lieu, on rassemble tout le matériel et les déchets qui s’y trouve, on trie et on range. Si c’est un espace ouvert, alors Fabrice en profite pour tondre la végétation. Progressivement, les Grivauds gagnent en clarté, en lisibilité, en ergonomie («tel outil a définitivement plus sa place ici qu’ailleurs»). À nos côtés, Hélène fait de nouveau des merveilles. Multirécidiviste sur notre ferme, qu’elle connaît désormais comme sa poche, elle prend de nombreuses initiatives et rend ce moment de remise à neuf du site prodigieusement ludique. Après cette semaine très dense et très productive, on se sent prêts à affronter 2022 sur de bonnes bases. En espérant que la météo suive notre enthousiasme.

Visite guidée de la serre à plants (enfin rangée)

Bonne année à toutes et tous et bonne salade de Mouron !

Changement de tempo

Allez les mâches, on fait un petit effort !

On a beau fixer le plant de mâches droit dans les yeux en lui murmurant des encouragements, il semblerait qu’il a décidé de faire une pause et de ne pas respecter notre calendrier de plantation. Et nous voilà errant dans le jardin, avec cette drôle d’impression de ne plus rien avoir à y faire… On est en pause de plantations, on est en pause de paniers d’Amap, on est en pause de désherbage : toutes les planches d’hiver (épinards, mâches, salades) sont propres… Les fraisiers ne nécessitent plus d’entretien depuis qu’on les a déménagés et c’était quand même un gros marronnier d’hiver pour nous. En plus, on est secondés par des wwoofeurs d’enfer (aaaaaahhhh, Nicolas…), qui nous donnent l’impression que le jardin pourrait tourner tout seul sans nous.

La météo nous le crie dans les yeux, dans les bottes et dans les gerçures de nos lèvres depuis 1des semaines : on est en hiver ! Mais nous, on avait du mal à y croire, comme si ce moment de flottement était illégitime, comme si on n’avait pas le droit de réduire la voilure, d’en faire un peu moins au cœur de la basse saison. Du coup, on termine notre comptabilité, on passe les commandes de graines, on fignole le plan de culture. Et on profite du retour d’un temps un peu plus sec pour tailler nos haies. L’occasion, comme toujours, de petites conférences gesticulées autour de l’écologie des Grivauds. «Bon, Nicolas, aujourd’hui, on parle des rosacées/des mycorhizes/des plantes pionnières/etc.» Et Nicolas riposte en me retraçant l’histoire du reggae ou en se lançant dans une séance d’impro théâtrale. D’ailleurs, j’avais envie de vous offrir une petite vidéo du lascar, en train de préparer un argumentaire de vente pour notre matériel agricole :

Bonnes fêtes à tous·tes !

Incorrigibles rampantes

Ça, c’est un drageon de prunellier ! (Le titre de cette photo aurait aussi pu être : ça, c’est un wwoofeur valeureux !)

La reproduction sexuée, on peut s’en passer. Surtout quand on est une plante. Pour cela, il suffit de trouver une manière de produire des clones. Et ça, la plante, elle sait bien faire : n’importe quel bourgeon est un clone en puissance. La preuve, il suffit bien souvent de prélever une branche et de la mettre en terre pour qu’elle fasse des racines ! C’est le principe de la bouture. Certaines plantes, plus malignes que d’autres, émettent une tige au ras du sol, dépourvue de feuilles et de fleurs, mais formant de nouveaux bourgeons de proche en proche. Bourgeons qui se développent et s’enracinent dès qu’on a le dos tourné. C’est ce qu’on appelle un stolon. C’est comme ça que les fraisiers se multiplient, d’ailleurs. Toutes ces plantes qui ont cette capacité de couvrir le sol autour d’elles avec des clones sont dites rampantes. Deux exemples bien connus des jardiniers : la renoncule rampante et la potentille rampante. Et si le stolon est sous-terrain, alors, on appelle ça un drageon ou un rhizome. Ainsi le chiendent se fraie-t-il un chemin à travers les prairies et les champs… Ce petit coquin.

Sous les bords d’une bâche d’occultation longue, on trouve des stolons (ici de renoncule rampante) qui se faufilent…

Ces plantes rampantes constituent une source majeure de préoccupation pour le maraîcher en MSV. L’absence de travail du sol rend leur progression inexorable et elles s’invitent joyeusement dans nos planches, faisant fie de nos paillages. Seule manière de les limiter : l’occultation. On les prive de lumière suffisamment longtemps et on est tranquilles. Oui, mais… Oui, mais, attention, les stolons sont capables de se développer et de survivre dans des zones même faiblement éclairées. Lorsqu’on lève une bâche d’occultation, les zones proches des bords sont souvent encore colonisées de stolon de potentilles ou de renoncules, fraîchement enracinés. C’est pour cela qu’il est préférable d’occulter une large zone du champ, plutôt que des planches isolées. C’est pour cela aussi qu’ici, aux Grivauds, on commence à entourer nos planches de serre de toile tissée, pour éviter d’avoir sans cesse à désherber les rampantes qui s’installent sans cesse sur nos entrées de serre.

Autour de la serre 7, des toiles tissées de 50 cm empêchent les potentilles de revenir s’installer sur les planches de culture

La grande haie qui longe la route est principalement composée de prunelliers, arbustes garnis d’épines qui ont le bon goût de drageonner joyeusement. Évidemment, on retrouve des drageons jusque dans nos planches de culture, et en particulier dans les futures planches de fraises. Alors on prend notre courage et nos drageons à deux mains et on tire sur toutes ces insolentes pousses de prunellier. Non mais. Notre wwoofeur du moment, Nicolas, participe vaillamment à l’opération et en est quitte pour quelques suées et quelques piqûres fourbes. Il était venu pour apprendre la permaculture, on commence d’emblée par lui faire arracher des arbustes à mains nues. Bienvenue aux Grivauds, Nicolas. Dis-toi qui si on a de belles fraises à l’avenir, ce sera grâce à toi. Voilà voilà…

À la semaine prochaine !

C’est mieux avec de la lumière

Pourtant, c’est beau la lumière rasante d’un soleil d’hiver…

Il y a un truc qui est vraiment nul avec la pluie, c’est que ça rend le jardin moins photogénique. Et en plus, ça mouille. Et après, on patauge dans les chemins. Et ça, ça nous fait râler encore plus qu’en temps normal. Bon mais, sérieusement, c’est fou comme j’ai du mal à prendre de belles photos du jardin en ce moment : il fait toujours gris et pluvieux. Du coup, dès qu’il y a une troué dans les nuées, je me précipite sur mon appareil et je capture l’instant. J’exagère à peine, depuis plus d’un mois, on a l’impression de ne plus voir le soleil que de façon très ponctuelle : un petit jour par-ci par-là. Nous, ça ne nous convient pas du tout ! Et pas seulement pour des histoires de photos ou même de moral. Mais aussi, parce que, figurez-vous que les cultures elles-aussi adorent la lumière. Bêtement pour la photosynthèse tout d’abord : sans soleil, le laboratoire chimique des feuilles est à l’arrêt… Ensuite parce que la lumière fait chauffer nos serres et que cette chaleur est aussi un facteur de croissance des végétaux. Enfin, parce que le soleil améliore l’évaporation et évite que l’eau stagne sur les feuilles. Ce séchage est très important parce qu’il permet d’éviter que les champignons (genre mildiou) ne se développent. De fait, les attaques fongiques sont nombreuses en cette fin d’automne : dans les salades et les épinards notamment. Rien à faire, c’est vraiment une année difficile jusqu’au bout !

Et je ne vous parle pas des levers de soleil…

Jour de pluie = jour de bureau. On s’enferme dans notre antre et on fait avancer les travaux administratifs du moment. Pour Fabrice, ça veut dire s’occuper de la comptabilité. Pour moi, ça tourne beaucoup autour de Qrop : planification des cultures 2022 et assolement. En passant, on lance une commande groupée pour du plant de poireau. Et on se dirige tout droit vers la commande de graines de l’année… Qui sera pour la semaine prochaine, si tout va bien.

Manon, perdue dans les épinards

N’empêche, on arrive quand même à avancer sur nos différents chantiers du moment. On prépare les futures planches de mâches (d’ailleurs, pour la prochaine, on va essayer une culture sur bâche) et de radis. Et on désherbe des épinards et des mâches. On est plutôt fiers de notre gestion de l’herbe sous serre cette année, d’ailleurs : tout est géré à un stade très précoce et les planches les plus problématiques (comme celles de serre 2 et 3) ont été bâchées. Moralité : c’est plutôt propre ! Profitons-en pour remercier Manon, qui termine là sa deuxième semaine de wwoofing dans notre ÉcoJardin et que le froid et l’humidité ont parfois mise à rude épreuve… On lui souhaite bonne route pour la suite de son périple.

À la semaine prochaine !