Régulièrement, on nous pose la question de la mécanisation en MSV (Maraîchage sur Sol Vivant) et on nous demande s’il n’existe vraiment aucun outil intermédiaire entre nos plantoirs tout-pourris et les gros tracteurs qui puent. Alors, qu’on se le dise une fois pour toute : oui, aux Grivauds, on est sans doute sous-équipés. Mais on est devenus tellement performants avec nos outils qu’on hésite à investir dans les fameuses «cannes à planter». Dans nos champs, il y a deux outils qu’on utilise quotidiennement : le sécateur et le plantoir. On ne parlera pas aujourd’hui de nos sécateurs (je vous réserve un petit article sur l’enherbement pour l’hiver, bande de veinards) mais je voudrais m’attarder une seconde sur nos plantoirs. D’ailleurs, quand on dit «plantoir», c’est un peu inexact. Certes, le plantoir conique nous sert de temps en temps (notamment pour les poireaux) et d’autres collègues en MSV n’utilisent que ça. Mais ce sont surtout des transplantoirs que nous utilisons. Les gros, en forme de pelle, nous servent pour planter les grosses mottes (tomates, courgettes, haricots, etc.). Si vous jardinez un minimum, vous en avez forcément un comme ça chez vous. Par contre, nous disposons ici d’un mini-transplantoir, adapté à la plantation des mini-mottes de 3,5×3,5 cm. Cet outil a été conçu pour extraire une carotte de sol en vue de déposer la motte dans le sol. Et de fait, c’est de cette façon que nous procédons pour les choux. Par contre, pour tout le reste, on utilise une autre propriété de ce plantoir : sa pointe est très dure et elle nous permet d’effectuer un petit travail du sol très localisé, juste à l’endroit où la motte doit être plantée. Ensuite, on vient appuyer la motte sur cette terre meuble et ça doit coller. Lorsque j’étais ouvrier agricole, on m’a appris que «coller, c’est planter». À l’époque, je plantais sur sol travaillé mais avec notre plantoir, on retrouve les mêmes sensations. Il y a deux choses supplémentaires à signaler. Premièrement, nous plantons généralement après paillage de la planche, ce qui signifie que l’outil puis la motte doivent traverser la paille, mais sans trop l’écarter si possible. Avec notre petit plantoir, on peut atteindre le sol simplement en secouant rapidement (vibrant) la pointe dans la paille. À ce moment-là, on tapote le sol deux ou trois fois et on ressort du paillage. Le cône ainsi formé a juste la taille de la motte et il n’y a plus qu’à planter. Quand l’opération est bien réalisée, il n’y a que le terreau de la motte qui voit la lumière, le sol reste caché sous la paille, ce qui évite plus tard que des graines d’annuelles (genre mouron ou chénopode) ne germent autour du plant. Dernier détail, l’outil est si solide que je peux attaquer une racine de vivace avec, si elle me gène : pas besoin de changer d’outil si je tombe sur un pissenlit ou un rumex. Et si vous persistiez à trouver ça rudimentaire, sachez que de nombreux jardiniers sur Sol Vivant plantent … à la fourchette. C’est d’ailleurs comme ça que j’ai commencé lorsque j’ai découvert le MSV. J’étais wwoofeur à l’époque. Mais c’est une autre histoire.
Mais cet outil magique, me direz-vous, où peut-on le trouver ? Bonne question, d’autant plus qu’on a un certain nombre de stagiaires qui se sont posés la même question ; on leur apprend à utiliser notre mini-transplantoir, alors autant qu’ils en disposent à leur tour lorsqu’ils seront installés. Malheureusement, notre plantoir adoré est … un outil artisanal ! Impossible à trouver dans les catalogues professionnels ou dans les magasins de jardinage. Qui plus est, depuis quelques mois, après deux grosses années de bons et loyaux services, notre outil a commencé à présenter des signes de faiblesse : le bois s’est élargi autour de l’axe et le rivet supérieur s’est cassé. Moralité : il me blesse la main et il m’oblige à une plus grande dépense d’énergie. Sans parler de l’angoisse profonde qui nous saisit à chaque fois qu’on l’égare. On s’imagine alors planter des séries de 1344 mottes de mâche à la fourchette… Il était temps qu’on prenne des mesures ! Et on n’y a pas été par quatre chemins : on a cherché un ferronnier autour de chez nous pour lui refiler le bébé. Coup de chance, il y en a un à Beaulon (M. Fontverne, Artemis Métal) et il a accepté immédiatement de relever le défi. Finalement, on se retrouve avec 5 nouveaux plantoirs et l’ancien se fera prochainement réparer. On va désormais pouvoir planter à plusieurs, laisser des plantoirs à différents endroits stratégiques du jardin, en refiler aux collègues (ou futurs collègues). Bref, tout est permis et l’avenir s’éclaircit subitement ! On va pouvoir de nouveau planter comme des fous à une cadence frénétique ! À nous les grosses planches de mâches, à nous les interminables séries de navets ou de betteraves ! À nous le succès, à nous le bonheur. Si avec ça on ne devient pas maîtres du monde, ah ah ah ah ah ah.
Pardon, je m’égare. L’enthousiasme, vous comprenez. Alors quoi de neuf cette semaine ? Eh bien, justement, on a joliment planté ! Des radis et des mâches en plein champ, d’abord. Ce qui, d’ailleurs, constitue notre dernière plantation de plein champ pour cette année (si on exclut l’ail). Et puis, on a commencé à remplir nos serres d’intersaison avec des scaroles, des frisées, des laitues et du mesclun. À nos côtés, on retrouve Sandra qui termine cette semaine son stage inaugural de BPRAPH (la même chose qu’un BPREA mais pour l’horticulture) et … le grand retour de Cécile, la wwoofeuse bretonne joyeusement délurée qu’on avait reçue en juillet, en même temps qu’Alice, avec qui elle formait un binôme mémorable. Bref, Cécile a un millier d’histoires à nous raconter après ses deux précédents wwoofings (dont un à Terre et Humanisme) et son séjour a un goût de trop court. Et aussi un bon goût de glace bio…
À la semaine prochaine !